Cautionnement hypothécaire et interet social

Cautionnement hypothécaire et intérêt social



annulation cautionnement hypotheque

Cass. com., 12 mai 2015, n° 13-28.504



Le cautionnement hypothécaire donné par une société n'est pas nul du seul fait qu'il serait contraire à l'intérêt social. C'est ce qu'a décidé la Cour de cassation par un arrêt du 12 mai 2015. Arrêt qui mérite d'être décrypté attentivement tant ses implications peuvent susciter le débat.

Une demande d'annulation à la lumière du droit européen

Les faits sont relativement simples. Une société a obtenu un crédit de la part d’une banque. La société qui la détient à 100% a souscrit un cautionnement hypothécaire sur son seul actif immobilier en garantie de ce crédit. La première société n’a pas remboursé, et la banque s’est tourné vers la seconde pour faire réaliser l’hypothèque. En défense, la société caution a prétendu que le cautionnement serait contraire à l’intérêt social et que cela constituerait une cause de nullité du cautionnement hypothécaire.

 

La Cour d’appel de Fort-de-France suit cette argumentation et annule ainsi le cautionnement hypothécaire. Cet arrêt est cassé par la Cour de cassation, qui a énoncé qu’il fallait interpréter l’article L.223-18 du Code de commerce à la lumière de la Directive européenne du 16 septembre 2009. En d’autres termes, on ne peut interpréter la loi française en ce qu’elle créerait des causes de nullité qui ne sont pas prévues par la Directive.


Une méprise sur le sens juridique de l'intérêt social

L’on prétend souvent - mais selon nous à tort - que l’intérêt social serait une condition de validité des actes accomplis par une société (A titre personnel, je me souviens de mes expériences d’enseignement, où les étudiants soutenaient mordicus que c’était le cas, pour l’avoir lu dans le manuel de référence. Je reconnaissais volontiers que la chose était écrite dans leur manuel, mais je considérais malgré tout qu’il s’agissait d’une erreur).

 

Cet arrêt va exactement dans ce sens. Le cautionnement hypothécaire n’est pas nul pour être contraire à l’intérêt social. Du moment qu’il entre dans le cadre de l’objet social, il est valable. Nous pouvons ajouter que pour les sociétés à risque limité (SARL, SA, SAS, etc.), il est valable même s’il n’entre pas dans le cadre de l’objet social du moment que le créancier est de bonne foi (c’est-à-dire que le créancier ignore que le cautionnement hypothécaire dépasse l’objet social). Pour être exhaustif, ajoutons que, pour les SA, le cautionnement doit être autorisé au préalable par le Conseil d’administration ou le Conseil de surveillance.

 

Voilà une décision qui va dans le sens de la sécurité des créanciers, garantis que le juge ne créera pas une cause de nullité qui ne ressortirait pas expressément des textes en vigueur.



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